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Deux ans après la fin de la guerre du Tigré, réparer les vivants

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People exercises walking on prosthesis at the physical rehabilitation centre of the Tigray Disabled Veterans Association in Mekele on October 9, 2024. - The Tigray Disabled Veterans Association rehab centre, opened in 1996, remained operational throughout the war thanks in part to support from the Red Cross. Its director, Brhame Teame, takes pride in the centre's neutral stance. (Photo by Michele Spatari / AFP)

Rediffusion dans le cadre de la sélection hebdomadaire des choix de la rédaction de l’AFP

“J’ai été touché par une bombe durant des combats, j’ai été blessé sur tout le corps”: Aregawi Mezgbe claudique et grimace légèrement en finissant ses exercices dans un centre de rééducation de Mekele, la capitale du Tigré.

Lorsque le conflit éclate entre les forces fédérales et les rebelles tigréens dans cette région septentrionale de l’Ethiopie, l’ancien mécanicien prend les armes au côté des Forces de défense du Tigré (TDF).

Le jeune homme de 29 ans raconte sa révolte après “les abus et les meurtres” commis par les “ennemis” lors du lancement d’une opération militaire en 2020 qui marquera le début d’une guerre dévastatrice.

En septembre 2022, dans la région voisine de l’Amhara, où s’étend le conflit, il est touché par une bombe. “J’ai eu la jambe droite amputée”, relate-t-il, en remontant légèrement le bas de son pantalon, dévoilant une prothèse.

Depuis ses blessures, Aregawi Mezgbe est suivi au centre de physiothérapie de Mekele, ouvert en 1996. La clinique de réhabilitation, qui offre une assistance gratuite, est restée opérationnelle durant toute la guerre, grâce notamment au soutien de la Croix-Rouge.

L’ancien combattant a dû faire de nombreuses séances de rééducation pour réapprendre à marcher.

“Le traitement médical que j’ai reçu ici est vraiment très bon”, sourit Aregawi Mezgbe, qui se projette enfin vers l’avenir: “Je voudrais ouvrir un commerce ou conduire un tuk-tuk”.

La guerre au Tigré, qui a fait rage de novembre 2020 à novembre 2022, a fait environ 600.000 morts (sur une population de la région estimée à 6 millions), et plus d’un million de déplacés internes.

Des milliers de personnes ont aussi été blessées, dans les bombardements, ou dans l’explosion de mines qui pullulent dans la région.

– Coma –

De cette journée du 28 novembre 2020, Saba Teklay ne se souvient “pas de grand chose”. La jeune femme de 25 ans se trouve sur le lieu de travail de sa soeur au coeur de Mekele lorsque l’édifice est bombardé.

Elle passe près d’un mois dans le coma. A son réveil, elle a été amputée au niveau de l’avant bras gauche. Sa jambe gauche a également été amputée.

Après plus de quatre mois d’hospitalisation, Saba Teckay, qui travaille dans une banque, “est venue directement” au centre de physiothérapie. “Je m’habitue aux prothèses que l’on m’a fabriquées”, souligne-t-elle.

En cette matinée d’octobre, le centre accueille une dizaine de patients, blessés à cause de la guerre ou amputés des suites de maladies. Une jeune fille d’une dizaine d’années, atteinte d’un cancer, enchaîne des allers-retours appuyée sur des barres parallèles pour s’habituer à deux jambes artificielles.

Dans une large pièce située à proximité du centre de physiothérapie, les prothèses sont fabriquées, dans un vacarme de coups de maillet et de perceuses.

Hagos Girmay fait partie depuis 2001 de l’équipe qui confectionne sur mesure les membres artificiels pour chaque patient.

Durant la guerre, “nous étions débordés par le travail, nous sommes restés tous les jours jusqu’à 22h”, se remémore l’homme de 55 ans, lui-même handicapé et blessé à la jambe droite lors d’affrontements armés contre le régime politico-marxiste du Derg (1974-1991).

“Quand je vois un patient venir avec des béquilles et repartir avec des prothèses artificielles, quand je le vois marcher en gardant son équilibre, je ressens de la satisfaction”, assure-t-il.

Le centre de Mekele est le seul à offrir de tels services en Ethiopie, pays qui compte environ 120 millions d’habitants, selon son directeur Brhame Teame.

“175 soldats de l’armée éthiopienne ont été traités ici durant la guerre, alors même qu’ils étaient venus pour nous tuer, mais nous soignons quiconque a besoin d’aide”, souligne-t-il.

Les armes se sont désormais tues au Tigré, à la faveur d’un accord de paix, mais Brhame Teame est inquiet des conflits qui font rage dans les deux régions les plus peuplées du pays, l’Amhara et l’Oromia.

“Nous avons désormais besoin de paix en Ethiopie, nous en avons assez des guerres”.

© Agence France-Presse

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