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L’Afrique : Toujours sous la mainmise de l’Occident ?

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A file photo taken in Senegal, then a French colony, in the 1930s shows a European being carried through a river by African porters in a sedan chair [File: AFP]

Résumé

L’Afrique, bien que riche en ressources et dotée d’une croissance économique prometteuse, continue de subir des pressions économiques, politiques, culturelles et technologiques héritées de la colonisation. Les relations complexes entre l’Afrique et l’Occident, marquées par des siècles de dépendance, soulèvent une question fondamentale : l’Afrique est-elle condamnée à rester sous cette influence, ou peut-elle se libérer pour bâtir un avenir autonome et prospère ? Cette analyse examine les pressions qui pèsent sur le continent tout en explorant les initiatives en cours et les perspectives d’avenir pour une indépendance durable.

Introduction : Héritage colonial et dépendances persistantes

La relation entre l’Afrique et l’Occident est une histoire de dépendances enracinées dans un passé colonial. Bien que l’Afrique ait fait des progrès notables dans divers secteurs, elle se retrouve souvent en position de vulnérabilité vis-à-vis des puissances occidentales, qui continuent d’exercer une influence considérable sur son développement. Les pressions économiques, politiques, culturelles et technologiques limitent la souveraineté des nations africaines, freinant leur émancipation complète. Pourtant, dans ce contexte, de nombreuses voix africaines se lèvent, plaidant pour un avenir où le continent pourrait se débarrasser des chaînes de la dépendance pour devenir un acteur majeur sur la scène mondiale.

Pression économique : Un cycle de dépendance complexe

Le poids de la dette et des institutions financières internationales
La dette publique des pays africains est un lourd fardeau qui limite leurs options de développement. En 2022, elle atteignait environ 1 000 milliards de dollars, et certains pays comme le Ghana consacrent plus de 44 % de leurs revenus fiscaux au remboursement de cette dette. Les institutions financières internationales comme le FMI et la Banque mondiale exercent un contrôle sur les politiques économiques africaines en imposant des réformes axées sur l’exportation de matières premières. Ces politiques limitent les capacités de développement interne et entravent les efforts de diversification économique.

Accords commerciaux inégaux et dépendance aux exportations brutes
Les relations commerciales entre l’Afrique et l’Occident reposent largement sur l’exportation de matières premières, un modèle économique hérité de la colonisation. Ce schéma de dépendance maintient les économies africaines dans une position de vulnérabilité, car les prix des matières premières sont volatils et dépendants des fluctuations des marchés internationaux. Felwine Sarr, économiste et auteur sénégalais, soutient que « l’Afrique doit valoriser ses ressources localement pour créer des chaînes de valeur autonomes et réduire sa dépendance aux marchés extérieurs ».

Perspectives d’avenir : vers une intégration économique régionale
Pour briser ce cycle de dépendance, l’intégration économique régionale représente une opportunité majeure. La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), si elle est pleinement exploitée, pourrait permettre d’augmenter les échanges intra-africains de plus de 50 % d’ici 2030. Cela favoriserait la création de chaînes de valeur locales et de nouvelles opportunités pour le secteur manufacturier. À plus long terme, une Afrique économiquement unie pourrait non seulement réduire sa dépendance vis-à-vis des marchés occidentaux mais aussi jouer un rôle clé dans le commerce mondial, notamment en matière de produits finis, renforçant ainsi sa position sur la scène internationale.

Pression politique : Entre autonomie et ingérence étrangère

Influence politique occidentale et soutien conditionnel
Les gouvernements occidentaux exercent une influence politique significative en Afrique, notamment par le biais de l’aide publique au développement. En 2021, l’aide occidentale à l’Afrique s’élevait à environ 11 milliards de dollars, mais elle est souvent conditionnée à des réformes politiques et économiques qui servent les intérêts des puissances donatrices. Cette aide conditionnelle limite la souveraineté des États africains en les contraignant à adopter des politiques favorables aux intérêts occidentaux. La dépendance de certains gouvernements africains à cette aide renforce le contrôle des puissances étrangères, empêchant ainsi le continent de construire une gouvernance véritablement indépendante.

Ingérence militaire et dépendance en matière de sécurité
Dans des régions comme le Sahel, la présence militaire occidentale est justifiée par la lutte contre le terrorisme, mais elle sert également des intérêts géostratégiques, notamment en matière de contrôle des ressources naturelles. Mohamed Diagouraga, géopoliticien malien, souligne que « la sécurité de l’Afrique ne doit pas dépendre de l’intervention étrangère, mais être construite sur des stratégies locales et inclusives ». Cette ingérence militaire compromet la souveraineté africaine en matière de sécurité et perpétue une dépendance envers les puissances étrangères.

Perspectives d’avenir : diversification des alliances et coopération Sud-Sud
Pour renforcer son autonomie politique, l’Afrique pourrait diversifier ses alliances et développer des partenariats stratégiques avec des puissances émergentes comme les BRICS. Une coopération accrue avec des régions partageant des intérêts similaires, telles que l’Amérique latine et l’Asie du Sud-Est, pourrait offrir des alternatives aux alliances traditionnelles, réduisant ainsi la dépendance envers l’Occident. En envisageant un avenir où l’Afrique pourrait, d’ici 2040, s’appuyer sur une diplomatie forte et sur des alliances équilibrées, le continent pourrait renforcer sa capacité à négocier et devenir un acteur influent sur la scène géopolitique mondiale.

Black underground miners without protective gear dig for copper in a South African mine in 1951. AFP via Getty Images.

Pression culturelle et médiatique : Reprendre le contrôle du narratif africain

Image de l’Afrique dans les médias occidentaux
Les médias internationaux jouent un rôle dominant dans la diffusion de l’image de l’Afrique. Souvent représenté comme un continent de conflits et de pauvreté, l’Afrique est rarement décrite dans ses aspects de résilience et de réussite. Environ 70 % des reportages sur l’Afrique dans les médias occidentaux se concentrent sur les crises, renforçant une image unidimensionnelle qui ne rend pas justice à la diversité et aux succès du continent. Patrice Nganang, écrivain camerounais, déplore cette perception biaisée qui limite l’Afrique à des stéréotypes dépassés et renforce un complexe d’infériorité.

Rôle de la diaspora et soutien aux médias panafricains
La diaspora africaine, qui contribue à hauteur de 45 milliards de dollars de transferts de fonds chaque année, joue un rôle de plus en plus important pour financer des initiatives locales et promouvoir une image positive de l’Afrique. Ces fonds pourraient servir à soutenir des médias indépendants capables de diffuser une perspective authentique et équilibrée. Avec le développement de médias panafricains, l’Afrique pourrait progressivement reprendre le contrôle de son narratif et renforcer sa présence dans le paysage médiatique international.

Perspectives d’avenir : émergence de réseaux médiatiques panafricains
D’ici 2035, il est envisageable que des médias panafricains atteignent une portée comparable à celle de chaînes internationales telles que CNN ou BBC. En s’appuyant sur des talents locaux, des financements de la diaspora et une coopération régionale, un réseau médiatique panafricain pourrait offrir une vision nuancée et authentique des réalités africaines, contribuant à redéfinir la perception du continent à l’échelle mondiale. Une telle évolution permettrait non seulement de renforcer l’image de l’Afrique mais aussi d’influencer les discours globaux sur les enjeux qui touchent le continent.

Pression technologique et numérique : Vers une souveraineté numérique

Dépendance aux infrastructures numériques étrangères
La dépendance africaine aux infrastructures numériques contrôlées par des entreprises occidentales compromet la souveraineté technologique du continent. Près de 90 % des services cloud en Afrique sont fournis par des entreprises américaines, exposant ainsi les données africaines aux ingérences étrangères. Cette dépendance limite la capacité des pays africains à protéger leurs informations et à gérer leurs données de manière autonome.

Initiatives locales et potentiel de la technologie
Malgré cette dépendance, des initiatives émergent pour construire une infrastructure technologique indépendante. Par exemple, le Rwanda investit dans la Kigali Innovation City, un centre technologique visant à former des développeurs et ingénieurs africains. Des start-ups comme M-Pesa au Kenya, qui a permis à 90 % de la population adulte d’accéder aux services financiers, montrent également le potentiel de l’Afrique à innover dans le secteur technologique pour répondre à ses propres besoins.

Perspectives d’avenir : indépendance numérique et technologie de pointe
À l’horizon 2040, l’Afrique pourrait atteindre une indépendance numérique en investissant dans des infrastructures locales de stockage de données, des centres de formation pour développeurs, et des programmes d’innovation technologique. Cette transformation permettrait au continent de protéger ses données sensibles, de renforcer sa cybersécurité et de développer des technologies adaptées à ses spécificités. Une Afrique numériquement souveraine pourrait également devenir un leader dans le domaine des technologies financières et de l’intelligence artificielle, offrant des solutions à d’autres régions du monde.

L’éducation : Investir dans le capital humain pour un avenir prospère

Défis éducatifs et formation professionnelle
L’éducation est essentielle pour construire une Afrique autonome, mais le continent est confronté à des défis d’accès à une éducation de qualité. Environ 60 % des jeunes Africains ne terminent pas leurs études secondaires, limitant ainsi le potentiel de développement. Le manque de formation spécialisée freine également la croissance dans des secteurs comme la technologie, l’ingénierie et la médecine.

Initiatives locales et autonomisation des jeunes générations
Des pays comme le Ghana et le Rwanda investissent dans l’éducation technologique pour former une nouvelle génération de leaders africains. En soutenant des programmes d’enseignement scientifique et technologique, ces pays montrent que l’Afrique peut développer ses propres talents et réduire sa dépendance envers l’expertise étrangère.

Perspectives d’avenir : vers un système éducatif africain inclusif et compétitif
En investissant massivement dans l’éducation et la formation professionnelle, l’Afrique pourrait, d’ici 2050, disposer d’une main-d’œuvre qualifiée et capable d’occuper des postes techniques, scientifiques et industriels. Un système éducatif inclusif et adapté aux réalités africaines pourrait faire du continent un pôle de compétence compétitif, rivalisant avec les régions d’Asie du Sud-Est et d’Europe de l’Est. Cette transformation permettrait à l’Afrique de répondre à ses propres besoins en compétences et de bâtir une économie indépendante et résiliente.

Conclusion : Une Afrique libre, autonome et influente sur la scène mondiale

Les pressions que l’Occident continue d’exercer sur l’Afrique révèlent une structure de dépendance qui semble parfois inévitable. Cependant, l’Afrique n’est pas condamnée à rester dans cette position. En s’appuyant sur des initiatives locales, en diversifiant ses alliances, et en investissant dans l’éducation et la technologie, le continent dispose des leviers nécessaires pour construire une indépendance durable et une influence globale. D’ici 2050, une Afrique économiquement intégrée, politiquement stable et technologiquement avancée pourrait s’affirmer comme un acteur central dans la gouvernance mondiale, capable de négocier d’égal à égal avec les autres puissances et de contribuer activement à la résolution des grands défis globaux.

© 2024 – Odon Bulamba / ADR

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