D\’ici 2027, l\’Europe devra diversifier son approvisionnement en gaz pour ne pas dépendre du gaz russe. Les pays africains pourraient-ils être une alternative viable ?
L\’invasion de l\’Ukraine par Vladimir Poutine a mis en lumière la dépendance énergétique disproportionnée de l\’UE vis-à-vis de Moscou. Ils pourraient peut-être s\’en affranchir grâce aux ressources du continent. L\’invasion de l\’Ukraine par les forces armées russes a pris le monde entier au dépourvu, et l\’Europe en particulier, malgré plusieurs semaines d\’avertissements. Si cette crise met en évidence les délicats défis géopolitiques et militaires entourant la future adhésion de l\’Ukraine à l\’Union européenne (UE) et/ou à l\’OTAN, elle souligne également la dépendance de l\’Europe vis-à-vis de la Russie pour l\’approvisionnement en gaz naturel.
Peut-être une alternative, en raison de leur proximité avec le marché européen, les récentes découvertes de pétrole et de gaz naturel en Namibie, au Mozambique, en Afrique de l\’Ouest, en Afrique du Sud et en Égypte semblent être une aubaine pour ces pays (du moins par rapport aux pays du Moyen-Orient ou Asie et Océanie). Ils pourraient également fournir du GNL à des pays d\’Amérique du Sud, en particulier au Brésil, où l\’utilisation du gaz naturel augmente rapidement.
Un changement de paradigme qui pourrait présenter une énorme opportunité pour plusieurs pays africains. L\’Afrique fournit actuellement 10% du gaz européen et dispose d\’un réseau de gazoducs reliant ses régions du nord au Vieux Continent. De plus, les réserves en haute mer et les mégaprojets de GNL du Mozambique en font un investissement attractif Selon une étude publiée le 23 février par le cabinet de conseil norvégien Rystad Energ. Selon la même étude, la production de gaz en Afrique subsaharienne devrait tripler d\’ici 2030. Alors que Vladimir Poutine masse ses troupes et véhicules blindés à la frontière ukrainienne le 17 février, le Niger, le Nigeria et l\’Algérie ont signé une déclaration commune relançant le projet de construction du gazoduc transsaharien, un mégaprojet vieux de quatre décennies qui traverse les trois pays.
Le PDG de Sonatrach, Toufik Hakkar, a déclaré le 27 février que l\’entreprise publique algérienne était prête à vendre plus de gaz à l\’Union européenne \”en cas de difficulté\”. Quelques jours plus tard, Eni, une société italienne, a affirmé être en mesure d\’accélérer la production dans les pays où elle opère, notamment l\’Algérie, l\’Égypte, le Congo, l\’Angola, le Nigéria et le Mozambique. On se rappelle que La présidente tanzanienne Samia Suluhu Hassan a affirmé dans une interview à The Africa Report qu\’elle avait eu des conversations avancées avec Total Energies. Ces nombreuses annonces s\’inscrivent dans une tendance de fond, même si elles prennent une importance accrue compte tenu de la récente flambée des prix de l\’essence. Malgré le fait que le Groupe d\’experts intergouvernemental sur l\’évolution du climat (GIEC) continue de blâmer le gaz pour la majorité du réchauffement climatique, la volonté d\’une \”transition énergétique verte\” s\’est améliorée ces dernières années.
Le gaz est fréquemment présenté comme le « meilleur carburant potentiel » pour cette transition, et il bénéficie de l\’engouement actuel pour l\’hydrogène. C\’est certes très polluant, mais ça pollue un peu moins que le pétrole et le charbon. Utiliser l\’hydrogène pour transporter le soleil du Maghreb vers l\’Europe. C\’est l\’objectif de la stratégie énergétique « verte » de l\’Union européenne. Mais quels seront les véritables atouts de la région ? Les grandes compagnies pétrolières hésitent de plus en plus à investir dans de nouveaux projets pétroliers. Pour autant, ils n\’abandonnent pas tous les hydrocarbures : la production de gaz augmente. La transition énergétique des promoteurs est cruciale pour les pays africains. Le problème pour eux, c\’est que les gisements déjà explorés trouveront toujours des investisseurs, même si ces derniers ne sont plus menés par les majors : au Nigeria, Shell, Total et Eni ont récemment vendu 45 % du champ offshore OML 17 au milliardaire Tony Elumelu pour 1,1 milliard de dollars. Si l\’équation du gaz repose essentiellement sur les exportations de GNL vers des marchés développés ou émergents significatifs (comme la Chine), elle est également couplée à des projets d\’électrification locaux (\”gas-to-power\”). C\’est le cas au Mozambique et au Sénégal, où le projet GTA alimentera plusieurs centrales électriques. Shell a investi dans le terminal GNL de Tema au Ghana, ce qui en fait le premier pays au sud du Sahara à importer du GNL. En Côte d\’Ivoire et au Bénin, Total compte faire de même. Tandis que, le terminal Soyo proposé en Angola fournira un plan d\’alimentation de 750 MW.
© ERIC KUIKENDE, LNL NEWS