Goma, RD Congo – L’ex-président de la RDC Joseph Kabila est apparu jeudi dans la grande ville de Goma contrôlée par le M23, signifiant devant la presse, quelques jours après avoir appelé à mettre fin à « la dictature » du régime actuel, son retour dans le pays qu’il avait quitté fin 2023.
Désormais opposant déclaré de l’actuel président Félix Tshisekedi, il s’est avancé, en présence du porte-parole du groupe armé antigouvernemental M23 Lawrence Kanyuka, vers les journalistes invités dans une de ses résidences où il recevait des responsables religieux.
Les lieux étaient gardés par des militaires du M23 et des membres du service de sécurité de ce militaire de carrière à la silhouette carrée et réputé taiseux.
Vêtu d’un costume sombre et déparé de son habituelle barbe, l’ex- chef d’Etat (2001-2019) n’a fait aucune déclaration. Affichant un air détendu et un large sourire, il s’est prêté au jeu des prises de vue devant les caméras et les appareils photo.
« Son souhait est que la paix soit restaurée », a déclaré à l’AFP l’évêque Joël Amurani, à l’issue de l’entretien que l’ex-président a tenu avec une délégation religieuse locale. Joseph Kabila prévoit de rencontrer des représentants de la société civile et des autorités traditionnelles de l’est, dans les prochains jours, avant de s’exprimer en public.
Selon un proche de M. Kabila à l’AFP, aucune alliance formelle n’a été conclue entre l’ancien chef d’Etat et le M23, mais ils partagent un « même objectif »: mettre fin au régime de Félix Tshisekedi.
Vendredi dans une rare allocution transmise en ligne, l’ancien président qui jouit toujours d’un important réseau d’influence, a déclaré compter jouer « sa partition » pour « mettre fin à la dictature, mieux, à la tyrannie » de son successeur.
Il a également déclaré qu’il serait à Goma « dans le prochains jours ». En avril, il avait déjà annoncé dans la presse son prochain retour au pays « par la partie orientale », dont une grande portion est sous contrôle du M23, soutenu par le Rwanda et son armée.
L’Est congolais, région riche en ressources naturelles frontalière du Rwanda, est déchiré par des conflits depuis 30 ans. Les violences se sont intensifiées ces derniers mois avec la prise de contrôle par le M23 de Goma et Bukavu, capitales des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.
– Accusé de trahison –
Dans son discours, M. Kabila a également dénoncé les « décisions » arbitraires du régime et fustigé une justice n’étant plus « qu’un instrument d’oppression d’une dictature qui tente désespérément de survivre », au lendemain de la levée de l’immunité parlementaire dont il bénéficiait en tant qu’ancien président et sénateur à vie.
Cette décision du Sénat, tombée sans surprise avec une coalition présidentielle détenant une majorité écrasante au Parlement, ouvre la voie à des poursuites judiciaires à son encontre alors que Kinshasa l’accuse de complicité avec le M23.
En avril, le ministre de la Justice Constant Mutamba a saisi la justice militaire afin d’engager des poursuites contre Joseph Kabila pour trahison, participation à un mouvement insurrectionnel, participation à des crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
Ces faits sont passibles de la peine de mort en RDC, où un moratoire sur l’exécution de la peine capitale en vigueur depuis 2003 a été levé en 2024. Aucune exécution n’a cependant eu lieu depuis.
La justice militaire a affirmé au Sénat avoir rassemblé « un faisceau de preuves », sous le coup du secret de l’instruction.
Un des principaux éléments exposés est un témoignage qui attesterait que Joseph Kabila a tenu une conversation téléphonique avec un haut responsable du M23 au sujet d’un plan orchestré par le Rwanda visant à assassiner l’actuel président de la RDC, Félix Tshisekedi.
Dans la foulée de l’annonce de M. Kabila en avril, les autorités congolaises avaient mené des perquisitions dans plusieurs de ses propriétés et prononcé la suspension des activités de son mouvement politique, le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD).
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