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Conakry, Guinée – L’ex-Premier ministre guinéen Ibrahima Kassory Fofana a écopé jeudi d’une peine de cinq ans de prison pour détournement de fonds, enrichissement illicite et corruption, une nouvelle condamnation d’un responsable sous l’ancien président Alpha Condé prononcée par une cour spéciale mise en place par la junte en Guinée.

M. Fofana, qui est incarcéré depuis avril 2022, a été Premier ministre du président Condé de mai 2018 à septembre 2021, date à laquelle le gouvernement a été renversé par un coup d’Etat militaire. Sa défense a décidé de faire appel de cette condamnation.

Il a été déclaré « coupable » par la Cour de répression des infractions économiques et financières (Crief), une juridiction anti-corruption instituée par les militaires qui ont renversé le président Condé (2010-2021).

L’ex-chef de gouvernement doit en outre payer une amende de deux millions de GNF (220.000 euros) et 18 milliards de GNF au total en dommages et intérêts (deux millions d’euros).

La Cour a également ordonné la confiscation de l’argent dans un compte bancaire au nom de M. Fofana, sans préciser de montant.

« Les voies de recours sont ouvertes à toutes les parties », a déclaré le juge de la Crief, Lansana Soumah, lors de la lecture de l’arrêt de condamnation. Le parquet avait requis la même peine de cinq ans de prison à l’encontre de M. Fofana lors de l’audience du 20 janvier.

Un avocat de M. Fofana, Sidiki Bérété, a dénoncé la décision rendue par la Crief.

Elle « n’a rien d’un jugement. (Ibrahima) Kassory (Fofana) n’a jamais comparu. Il n’a jamais bénéficié d’un débat contradictoire. C’est un jugement politique pour éliminer un candidat potentiel », a dit Me Bérété à l’AFP.

Mon client « ne se reproche rien. C’est regrettable de le condamner pour un montant de 15 milliards qu’on peut justifier. Si c’est vraiment la transition (vers un régime civil), c’est regrettable. On va (faire) appel de cette décision inique », a-t-il poursuivi.

L’avocat a en outre indiqué que l’ex-Premier ministre « n’était pas gestionnaire » des fonds dont la gestion lui vaut d’être condamné.

– malversations sur des fonds covid –

L’ex-Premier ministre ne s’est jamais présenté à une audience publique de la Cour, lui et ses avocats arguant de problèmes de santé depuis l’ouverture du procès il y a un peu moins de deux ans.

La Cour lui reproche des malversations sur 15 milliards de francs guinéens (plus de 1,6 million d’euros) destinés à la gestion anti-covid et à des programmes économiques et sociaux, sous M. Condé.

M. Fofana est l’un des nombreux anciens dirigeants et figures de l’opposition ou de la société civile incarcérés ou inquiétés sous la junte.

Avant lui, la Crief avait le 18 décembre condamné l’ancien ministre de la Défense Mohamed Diané à cinq ans de prison et 505 milliards de francs guinéens (environ 55 millions d’euros) de dommages et intérêts, pour détournement de fonds publics, enrichissement illicite, blanchiment de capitaux et corruption d’agents publics.

Elle avait le 2 décembre condamné un ancien président de l’Assemblée nationale et proche de M. Condé, Amadou Damara Camara, à quatre ans de prison ferme pour détournement et enrichissement illicite. Une audience en appel de la Crief prévue jeudi au sujet de M. Camara a été renvoyée au 20 mars pour lui permettre de se soigner en Guinée.

Les militaires ont officiellement fait de la lutte contre la corruption, réputée endémique en Guinée, un de leurs combats proclamés.

La junte a ordonné en novembre 2022 d’engager des poursuites contre l’ex-président Condé et plus de 180 hauts cadres ou ex-ministres, notamment pour des faits présumés de corruption.

Elle avait déjà lancé en mai 2022 une action contre M. Condé pour des faits présumés d’assassinats, actes de torture, enlèvements et viols, dans ce pays où la répression des manifestations politiques est souvent brutale.

Le chef de la junte, le général Mamadi Doumbouya, a assuré qu’il n’y aurait pas de « chasse aux sorcières » mais l’opposition dénonce la répression des libertés et l’instrumentalisation de la justice.

Sous pression internationale, la junte s’était engagée à organiser un référendum constitutionnel et à transférer le pouvoir à des civils élus avant fin 2024, mais aucune de ces promesses n’a été tenue.

© Agence France-Presse

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