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Nairobi, Kenya – (AFP) – Alex Okwomi se concentre, son objectif rivé sur deux femmes parées de robes rouge éclatant, qui profitent de son studio mobile sur la rue Koinange pour se faire tirer le portrait avec, en arrière-plan, la skyline du quartier d’affaires de Nairobi.

“On approche simplement des gens qui marchent dans la rue, au hasard”, raconte le photographe de 27 ans, aussi équipé d’un flash et réflecteur de lumière, expliquant que les clients qu’il parvient à convaincre sont généralement “bien habillés”.

Il fait partie des dizaines d'”entrepreneurs” opérant en ce dimanche ensoleillé dans les rues relativement calmes du Central Business District (CBD), grouillantes de monde et de véhicules le reste de la semaine.

Depuis l’abandon de restrictions dans la capitale kényane en 2022 par les autorités assurant vouloir favoriser “l’économie créative” pour la jeunesse étranglée par le chômage, ils sont de plus en plus nombreux à s’y rendre armés de leurs boîtiers, plusieurs fois par semaine, pour mitrailler des poseurs endimanchés.

Les photographes, la plupart dans la vingtaine, ne sont pas les seuls à s’être saisis de l’opportunité: des dizaines de groupes de TikTokeurs, nombre d’entre eux tout juste majeurs, profitent du cadre pour “créer du contenu”, surtout des danses, baffles de musique à terre diffusant des rythmes de basse de l’arbantone, un style à la mode dans le pays.

Les forces de l’ordre, qui les chassaient jusqu’à il y a peu, observent tranquillement les portraitistes et créateurs de contenus, espérant surtout décourager des vols de matériel.

L’ambiance contraste avec les scènes de violences il y a cinq mois dans le quartier où se trouve le parlement kényan, lorsque la police a durement réprimé des manifestations anti-gouvernementales, menées par la Génération Z, qui a grandi dans les années 2000 et 2010.

Plus de 60 personnes sont mortes dans le pays, et des dizaines ont disparu.

– changer le monde –

Lermi, un étudiant de 19 ans qui avait pris part à la contestation née d’un projet de loi prévoyant de nouvelles hausses d’impôts, se dit “très déçu” par le gouvernement.

A l’aide de ses vidéos, il espère aujourd’hui faire “connaître la musique kényane et africaine au reste du monde”, et changer le monde, à son échelle, “grâce à l’art”.

“La photographie de rue a changé les rues. Nous créons des souvenirs”, se félicite Alex Okwomi, qui a laissé tomber un job dans un fast-food.

Pour les portraitistes, qui facturent environ 100 shillings (un peu moins d’un euro) par cliché, l’aubaine est aussi financière.

L’un d’entre eux glisse que l’activité “paye son loyer”. Brian Roberts, 25 ans, est satisfait de pouvoir gagner 2.500 shillings le dimanche (environ 20 euros).

Mais “le plus important”, souligne-t-il, est que la photographie de rue ouvre d’autres opportunités: deux ans après avoir commencé, il est régulièrement engagé pour immortaliser des événements.

“La jeunesse n’a pas beaucoup d’opportunité d’emploi. Alors ils nous autorisent à venir, et à montrer notre talent”, souligne le musicien “Handsy Adonis”, 24 ans, entouré de danseurs.

Le quartier, avec ses hauts bâtiments multicolores, possède “de belles caractéristiques pour apparaître sur une vidéo”, raconte celui qui rêve d’une renommée mondiale.

Un duo anonyme déguisé en loup et en tortue dit être là pour “faire des blagues”, en surgissant dans les vidéos de leurs comparses. “Les gens ont besoin de rire”, disent-ils.

Une philosophie à laquelle Linnet Ouma, 19 ans, adhère.

“Vous pouvez rendre quelqu’un qui est triste heureux grâce à votre danse ou votre contenu”, estime-t-elle. “C’est positif”.

© Agence France-Presse

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