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Bamako, Mali (AFP) – La junte au pouvoir au Mali a parachevé jeudi la militarisation de l’exécutif en nommant un général, Abdoulaye Maïga, au poste de Premier ministre à la place du civil Choguel Kokalla Maïga, limogé après avoir critiqué le flou sur la date de départ des militaires.

Le général Maïga, jusqu’alors porte-parole du gouvernement et à ce titre messager en uniforme des annonces les plus retentissantes de la junte, remplace un vétéran civil de la politique.

Sa nomination confirme l’appropriation sans partage des postes de pouvoir par les militaires aux commandes depuis 2020 de ce pays pauvre et enclavé, confronté au jihadisme et à une profonde crise multidimensionnelle.

« Le général de division Abdoulaye Maïga est nommé Premier ministre », indique un décret du chef de la junte, le général Assimi Goïta, lu dans un flash spécial sur la télévision d’Etat par le secrétaire général de la présidence, Alfousseyni Diawara.

Le nouveau gouvernement a été annoncé quelques heures après par un autre flash spécial. Les proches de l’ancien Premier ministre en sont écartés. Les principaux portefeuille conservent leurs titulaires, dont ceux de la Défense et de la Réconciliation, entre les mains de deux des principales figures de la junte.

Abdoulaye Maïga, 43 ans, est l’un des visages les plus publics de la junte, préposé à la lecture des décrets présidentiels et de la plupart des déclarations tonitruantes des autorités, qui n’ont pas manqué depuis le putsch de 2020.

Généralement en béret et en treillis, il a été la voix à la télévision de la rupture avec l’ancienne puissance coloniale française et ses alliés, et du tournant stratégique en direction de la Russie après un second coup d’Etat des mêmes militaires en 2021.

C’est lui qui en janvier 2022 avait demandé de se taire à la ministre française des Armées de l’époque Florence Parly, en citant le poète français Alfred de Vigny.

En septembre 2022, ce titulaire d’un baccalauréat de langues et littérature convoquait à la tribune des Nations unies un autre grand nom de la poésie française, Victor Hugo, en accablant de critiques la France, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres et certains dirigeants ouest-africains.

Il assurait alors pendant quelques mois l’intérim de celui qu’il remplace aujourd’hui à la tête du gouvernement, victime d’un accident vasculaire cérébral.

L’officier a été mis à contribution pour annoncer la rupture des accords de défense avec la France, crier à l’instrumentalisation face aux accusations d’exactions de l’ONU contre l’armée nationale, et faire connaître l’interdiction des médias français RFI et France 24.

– « Opacité totale » –

Rien qu’en 2024, il a annoncé au nom de la junte la fin d’un important accord de paix avec les rebelles indépendantistes du nord, la suspension des activités des partis politiques et la rupture des relations diplomatiques avec l’Ukraine.

C’est à lui qu’il est revenu en 2023 d’aviser que la présidentielle de février 2024, censée ouvrir la voix au retour des civils, connaîtrait « un léger report pour des raisons techniques » et que de nouvelles dates seraient communiquées « ultérieurement ».

Elles ne l’ont toujours pas été.

Le général Maïga présente un volumineux CV de diplômes et de formations délivrés au Mali, en France ou en Algérie, dont un doctorat en sécurité internationale. Gendarme de formation, il a travaillé pour l’Union africaine, la Communauté des Etats ouest-africains et la mission de stabilisation de l’ONU en République démocratique du Congo.

Contrairement à des membres de la junte à commencer par son chef, il n’est pas connu pour avoir fait la guerre.

Il ne figurait pas dans le premier cercle des colonels qui ont renversé le président civil Ibrahim Boubacar Keïta en août 2020 et qui ont depuis été élevés au grade de généraux. Il s’est rapidement rallié à eux.

Le général Maïga prend la tête du gouvernement alors que les militaires maintiennent un flou complet sur leur éventuel départ.

Ils ont dénoncé l’engagement qu’ils avaient pris initialement sous la pression internationale de rendre le pouvoir à des civils en mars 2024 après des élections.

Le général Goïta est pressenti comme probable candidat à une future présidentielle, en dépit d’autres engagements premiers à ne pas briguer le mandat à l’issue d’une période (la « transition ») au cours de laquelle ils promettaient de restaurer la stabilité et la souveraineté de leur pays.

Le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga a été limogé mercredi avec le gouvernement pour avoir critiqué « l’opacité totale » dans laquelle les militaires restaient aux commandes du pays. Sa nomination en 2021 avait été considérée comme la caution civile de la « transition ». Il passait pour isolé, avec une capacité d’action limitée.

© Agence France-Presse

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