Sénégal : Retour en Politique de Macky Sall et Alliances Stratégiques pour les Législatives du 17 Novembre
Dakar — Le Sénégal se prépare pour des législatives anticipées ce 17 novembre, un scrutin crucial qui pourrait redéfinir l’équilibre des pouvoirs dans le pays. Face à une coalition de libéraux menée par l’ancien président Macky Sall, le tandem du président Bassirou Diomaye Faye et de son Premier ministre Ousmane Sonko cherche à consolider sa récente victoire présidentielle. Cette élection marquera non seulement le retour de Sall en politique nationale, mais aussi un test pour l’alliance politique de l’ancienne garde, mise au défi par le gouvernement Pastef, fort de son ascension électorale fulgurante.
Macky Sall : Un Retour Inattendu pour la Cohabitation
Après avoir quitté la présidence en mars et brièvement occupé un poste international en tant qu’envoyé spécial pour le Pacte de Paris pour les peuples et la planète, Macky Sall revient au Sénégal avec une ambition clairement affichée : former une majorité parlementaire pour imposer une cohabitation au gouvernement actuel. Sa coalition, Takku Wallu Sénégal, regroupe plusieurs grandes figures de l’opposition libérale, y compris des vétérans politiques comme Karim Wade et Idrissa Seck, dans un effort concerté pour contester la domination du Parti Pastef.
Dans une lettre ouverte adressée à la population sénégalaise, Sall critique sévèrement les dirigeants actuels, les qualifiant de « stagiaires » incompétents. Il accuse le gouvernement de Sonko et Faye d’avoir « assombri les perspectives de l’économie nationale » en raison de leur gestion économique controversée, ce qui, selon lui, a entraîné la dégradation de la note souveraine du pays.
Critiques de la Gouvernance de Pastef
La coalition Takku Wallu Sénégal reproche au gouvernement de Pastef un manque de stabilité et de vision économique. Sall souligne notamment la chute des investissements et la hausse du chômage, des phénomènes exacerbés, selon lui, par des décisions politiques qu’il qualifie de précipitées et mal réfléchies. Le gouvernement Sonko-Faye a riposté en dénonçant ces accusations comme « infondées » et a rappelé que les réformes en cours visent à redresser une situation laissée par les gouvernements précédents.
Dans une série de publications et d’interventions médiatiques, le camp de Sall cherche à présenter une alternative crédible pour les Sénégalais, promettant une gouvernance stabilisatrice et une reprise économique rapide si sa coalition remporte les élections.
Une Coalition Libérale en Pleine Tension Interne
Si la coalition Takku Wallu Sénégal est ambitieuse, elle n’est pas sans ses propres défis. L’alliance entre l’Alliance pour la République (APR), le Parti démocratique sénégalais (PDS) et Rewmi, bien que puissante, est également minée par des tensions. Le leader de Rewmi, Idrissa Seck, exprime des réserves sur son rôle marginalisé au sein de la coalition, alors que son parti peine à obtenir des positions significatives sur la liste électorale.
Certains analystes voient en ces dissensions un potentiel frein à l’unité de la coalition, mettant en doute la capacité de Sall à maintenir un front uni. Cependant, malgré les frustrations internes, la coalition Takku Wallu Sénégal reste une force notable dans la course aux sièges parlementaires, déterminée à contrer la dynamique de Pastef.
Pastef : Une Opposition Qui Défie l’Ancien Ordre
De son côté, le gouvernement de Pastef affiche une cohésion et une popularité croissante sous la direction d’Ousmane Sonko et de Bassirou Diomaye Faye. Après leur victoire au premier tour de la présidentielle, Pastef s’est imposé comme un acteur politique incontournable, appuyé par un discours anti-corruption et de réformes économiques. Leur stratégie pour les législatives est de mobiliser leur base et d’accroître leur ancrage dans les régions rurales.
Sonko a récemment lancé un audit des finances publiques qui critique la gestion précédente, accusant Macky Sall d’avoir falsifié les données budgétaires. Cette démarche, bien reçue par une partie de l’électorat, renforce l’image de Pastef comme un parti de renouveau en lutte contre les pratiques du passé.
Vers un Gouvernement d’Union Nationale ?
Macky Sall et sa coalition espèrent former un gouvernement de cohabitation en cas de succès lors des législatives, proposant un cabinet d’union nationale capable de restaurer la stabilité et d’initier des réformes structurelles. Cette approche est cependant accueillie avec scepticisme par Pastef, qui perçoit dans cette proposition une tentative de saboter l’autonomie du gouvernement actuel.
Le politologue sénégalais Amadou Diop estime que cette élection législative pourrait être déterminante pour l’avenir politique du Sénégal. « Un gouvernement de cohabitation, s’il est adopté, marquera une nouvelle ère de compromis politique, mais cela pourrait également engendrer des conflits internes si les objectifs divergent trop entre les partis coalisés, » déclare Diop.
Conclusion : Un Tournant pour le Sénégal
À l’aube de ces législatives, les Sénégalais se retrouvent devant un choix décisif entre le camp de Pastef, incarnant la nouvelle gouvernance et une politique axée sur la transparence, et celui de Takku Wallu Sénégal, promouvant un retour à une expérience politique plus traditionnelle et à une gestion supposée plus stable. Si les libéraux parviennent à obtenir une majorité, le pays pourrait entrer dans une phase de cohabitation politique sans précédent, posant de nouveaux défis institutionnels.
Ces législatives seront donc bien plus qu’un simple renouvellement parlementaire : elles définiront la trajectoire politique du Sénégal pour les années à venir, en influençant la gouvernance, les alliances régionales, et l’économie. Les résultats du 17 novembre seront ainsi scrutés de près par les observateurs internationaux, désireux de comprendre comment cette nation ouest-africaine naviguera dans ce contexte de transformation politique intense.
© Odon Bulamba / Africa Daily Report