Une historienne française, autrice d’un livre sur la Casamance, région du sud du Sénégal en proie à une vieille rébellion indépendantiste, s’est défendue cette semaine de prôner des idées autonomistes, après de vives protestations sur l’ouvrage dans le pays.
Séverine Awenengo Dalberto, chercheuse au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), devait présenter samedi à Dakar son ouvrage publié aux éditions françaises Karthala et intitulé “L’idée de la Casamance autonome – Possibles et dettes morales de la situation coloniale au Sénégal”.
Mais la librairie “Aux quatre vents” a annoncé mercredi l’annulation de la cérémonie de dédicace, sans explication. Les éditions Karthala ont estimé que la décision d’annuler la séance de dédicace a été prise “face au risque de voir son déroulement perturbé”.
“Depuis l’annonce de la sortie et de la présentation de mon dernier ouvrage, des commentaires malveillants et infondés circulent autour de son soi-disant contenu et de mes intentions, relayés dans divers médias et sur les réseaux sociaux”, a regretté la chercheuse dans un communiqué reçu vendredi soir par l’AFP.
“Mon travail est strictement historique”, a-t-elle affirmé, assurant que l’ouvrage “ne vise aucunement à rouvrir les fractures comme certains pourraient le craindre”.
Selon elle, les accusations dont elle fait l’objet “alimentent un climat potentiellement dangereux pour (sa) sécurité et (son) intégrité physique”.
L’annonce de la publication du livre avait provoqué de vives protestations dans le pays.
L’Alliance pour la République, parti au pouvoir jusqu’à la présidentielle de mars, avait protesté dans un communiqué contre la publication d’un ouvrage qui “remet en question les acquis” sur la paix en Casamance et est “dangereux” pour l’unité nationale.
Les éditions Karthala ont regretté “une instrumentalisation politique d’un ouvrage scientifique par des personnes qui n’ont, manifestement, pas pris connaissance de son contenu”.
Le livre a également suscité de vifs débats sur les réseaux sociaux au Sénégal, où l’évocation du conflit en Casamance reste sensible. L’État sénégalais rejette l’autonomie.
Un précédent ouvrage d’un autre chercheur français, Jean-Claude Marut (“Le conflit de Casamance – Ce que disent les armes”, Karthala), avait été interdit en 2010.
La Casamance, séparée du nord du Sénégal par la Gambie, est le théâtre d’un des plus vieux conflits du continent depuis que des indépendantistes ont pris le maquis en décembre 1982.
Après avoir fait des milliers de victimes et ravagé l’économie, le conflit a fortement baissé d’intensité mais persiste à petit feu.
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