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Le nombre de violations signalées à l\’armée malienne et aux mercenaires de Wagner démontre la complexité du devoir de la mission onusienne. C\’est d\’autant plus vrai qu\’il est déchiré à l\’intérieur.
Le 7 février, les deux adversaires se retrouvent pendant cinq heures pour discuter de la sécurité en Europe de l\’Est et de la crise en Ukraine, menacée par l\’invasion russe. Le Mali, en revanche, est sur la table des discussions. Depuis des mois, Paris dénonce le rôle grandissant du groupe Wagner à Bamako, tandis que Moscou se contente de nier tout lien avec ces mercenaires. Emmanuel Macron, en correctif, ne se trompe pas facilement. Il dispose d\’informations de ses services de renseignement qui prouvent la parenté du groupe avec Evgueni Prigojine, un familier de celui qui se tient devant lui aujourd\’hui.

L\’arrivée de mercenaires au Mali, qui a provoqué le retrait de Barkhane, s\’est faite avec l\’aval du Kremlin, comme le sait le président français. Ce n\’est pas la première fois qu\’Emmanuel Macron s\’élève contre cette connexion. Il l\’a fait à propos d\’un autre pays africain, la République centrafricaine, il y a quelques mois, et son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, l\’a répété récemment. Pour saper Vladimir Poutine, il en faut plus. Ce dernier sait qu\’il a été retrouvé, mais il est en sécurité. En Russie, où les entreprises militaires privées sont interdites, le groupe Wagner n\’a pas d\’existence légale. Et personne n\’a jamais réussi à obtenir une directive directe du Kremlin aux mercenaires. En conséquence, le président russe Vladimir Poutine dément. Le jeu de poker menteur continue.

Les Français, emmenés par Emmanuel Macron, craignent désormais une contagion. Ils ont en ligne de mire le Burkina Faso et le Niger après avoir sous-estimé celui-ci lorsque Wagner a mis les pieds pour la première fois en République centrafricaine, puis pensant, à tort, qu\’une répétition du scénario centrafricain serait peu probable au Mali, ils ont désormais en ligne de mire visé le Burkina Faso et le Niger. Les ambitions wagnériennes sont des cibles évidentes, et le sentiment anti-français est déjà endémique.

Les Occidentaux et leurs alliés surveillent maintenant un autre risque de réaction en Afrique de l\’Ouest, tout comme les responsables soviétiques s\’inquiétaient auparavant d\’un effet domino renversant une à une les républiques sœurs d\’Europe de l\’Est. Interrogé sur l\’apparition de Wagner à Bamako, le président nigérien a déclaré à Jeune Afrique que ce n\’était \”pas la solution\”. Entre 200 et 400 personnes ont été tuées. Les chiffres, bien qu\’encore imprécis, donnent une idée de l\’ampleur des tueries survenues à Moura, dans le centre du pays, entre le 27 mars et le 1er avril. L\’armée malienne, aidée par les mercenaires de Wagner, a mené \”une opération massive\” contre \”organisations terroristes armées\” pendant ces quelques jours. De nombreux récits dénoncent cependant un \”massacre\” au cours duquel des civils, en particulier peuls, ont été tués sans discrimination. Presque immédiatement, des voix se sont élevées pour réclamer le lancement d\’une enquête impartiale sur ce qui s\’est passé à Moura.

Comme il est de coutume en pareil cas, tous les regards étaient attirés par la Minusma, la mission onusienne au Mali. La mission de maintien de la paix de l\’ONU, créée en 2013, compte plus de 12 000 soldats et 1 500 policiers sur le sol malien, mais ses représentants soulignent qu\’il ne s\’agit pas d\’une force offensive. Il est incapable de combattre ou d\’arrêter une opération de l\’armée malienne, ce qui explique sa non-intervention à Moura alors qu\’il dispose d\’une base à Mopti, à seulement trente kilomètres. La promotion et la protection des droits de l\’homme est l\’une des principales préoccupations de l\’organisation. Selon des sources fiables, les \”blocus\” imposés par El Ghassim Wane, le chef de la Minusma, qui interdirait ou retarderait la publication des conclusions et enquêtes de sa division des droits de l\’homme, sont en cause (DH). \”Wane a assez peur de bouleverser ses liens avec la junte, il est donc très prudent à ce sujet, ajoute un responsable de l\’ONU, invoquant un besoin de survie professionnelle. Wane ralentirait évidemment le traitement de ces données critiques afin d\’éviter de provoquer une rupture avec l\’autorité de transition et de mettre en péril son avenir. La Mission des Nations Unies, qui dépend fortement des forces françaises, pourrait avoir des difficultés à faire face aux groupes terroristes ainsi qu\’aux mercenaires russes de Wagner. Elle s\’est longtemps abstenue de faire des déclarations ou de prendre parti dans l\’impasse entre Paris et Bamako, et elle est actuellement à l\’abri des critiques de la junte d\’Assimi Goïta.

Cependant, avec la déclaration d\’Emmanuel Macron sur l\’évacuation définitive des forces françaises de Barkhane et de la force Takuba du Mali, la Minusma a été spectatrice dans ces querelles diplomatiques. Le retrait des forces françaises du Mali aura un impact sur la mission, a déclaré le porte-parole de la Minusma, Olivier Salgado. Nous ferons les efforts nécessaires pour nous adapter à la nouvelle situation afin de pouvoir continuer à mener à bien notre mission. Même dans les couloirs du siège des Nations Unies à New York le 17 février, ces incertitudes et ces peurs ont fait écho. Des représentants des pays membres du Conseil de sécurité ont participé ce jour-là aux négociations sur l\’avenir des casques bleus au Mali. L\’ONU a déployé lundi 21 février à Bamako son sous-secrétaire général pour l\’Afrique, la Ghanéenne Marta Ama, pour voir dans quelle mesure les Nations unies peuvent apporter leur soutien à la Minusma. Elle s\’est entretenue avec Abdoulaye Diop, accompagné de l\’envoyé spécial de la Minusma, El Ghassim Wane Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale du Mali. Dans le prolongement de ces entretiens, Wane a rencontré le lendemain Sadio Camara, l\’important ministre de la Défense et l\’un des cerveaux de la Russie stratégique au Mali.

Ces pourparlers diplomatiques suffiront-ils à maintenir la mission de l\’ONU dans les régions du centre et du nord du Mali ? La Minusma peut cependant se concentrer sur un autre terrain pour démontrer son efficacité. Cela pourrait contribuer à améliorer la communication intercommunautaire et faciliter les pourparlers entre les autorités maliennes et les chefs terroristes Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa. Les rapports s\’accumulent. Ils auraient dû ou auraient pu faire leur apparition, mais ils ne l\’ont pas fait. Les rapports sortaient sous Annadif le prédécesseur de Wane. Wane n\’est pas comme ça. Les publications ralentissent, précise une source interne. Cependant, il est important de noter que le cadre malien a radicalement changé entre les mandats des deux hommes. El Ghassim Wane n\’était aux commandes que depuis mars 2021 lorsque la junte commandée par Assimi Goïta a organisé un deuxième coup et reprend le plein pouvoir à Bamako deux mois plus tard.Un changement significatif dans le paysage politique, auquel la Minusma ne cesse de s\’adapter. Il n\’est pas prévu de censurer quoi que ce soit.

Le directeur de la division des droits de l\’homme de la Minusma, Guillaume Ngefa, rejette les allégations, qu\’il qualifie de \”fables\”. El Ghassim Wane, avec qui j\’ai aussi d\’excellents contacts, promet-il, n\’a aucune envie de censure. Certaines personnes au sein de l\’entreprise soulignent également que les rapports ne sont pas nécessairement destinés à être rendus publics. Ce n\’est pas parce que nous réalisons une enquête que nous devons la publier, a expliqué l\’une de nos sources.

Une étude de la division des droits de l\’homme de la Minusma, dévoilée par JA le 5 mars, a clairement pointé du doigt le blâme. Dans le village de Dangere-Wotoro, une sépulture collective a été découverte, selon les Fama et Wagner. Un document qui n\’a pas encore été publié, alors même qu\’une source onusienne affirme qu\’un texte sur les violations contre les civils dans le centre du Mali sera publiés dans les prochaines semaines. Les chefs de mission jouent un rôle plus diplomatique et s\’efforcent de maintenir intactes leurs relations avec les autorités locales. Au sein des missions de l\’ONU comme la Minusma, la question de savoir s\’il faut ou non publier des rapports sensibles est fréquemment débattue. C\’est un modèle vraiment conventionnel, explique un responsable de l\’ONU sur le continent. Les membres des divisions RH sont fréquemment sollicités et souhaitent accomplir leurs tâches sans interruption. Les chefs de mission, quant à eux, adoptent une approche plus diplomatique et s\’efforcent d\’entretenir de bonnes relations avec les autorités locales. La Minusma a lancé une enquête sur les événements de Moura, comme le réclamaient plusieurs partenaires internationaux et États membres comme la France et les États-Unis. Les enquêteurs des droits de l\’homme, en revanche, n\’ont pas encore pu se rendre sur place. Les résultats de leurs recherches devraient être rendus publics cette fois.

© RÉDACTION LEO NJO NEWS

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