Cette boisson n’est pas un remède contre le cancer

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Cette boisson à base d’aloe vera et de fruits n’est pas un remède contre le cancer

Chaque année, l’Afrique enregistre environ 1,1 million de nouveaux cas de cancer, et jusqu’à 700 000 décès des suites de cette maladie, selon les chiffres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le coût de la prise en charge des patients est élevé sur le continent où les familles se tournent parfois vers des “remèdes” dits naturels, mais sans aucun gage d’efficacité. Une publication soutenant qu’une mixture à base d’aloe vera et de fruits est un traitement efficace contre le cancer circule de façon virale depuis 2020. Ces derniers mois, elle a été de nouveau partagée par de nombreux internautes en Afrique de l’Ouest. Les spécialistes contactés par l’AFP ont indiqué que ce pseudo-remède n’a aucun fondement scientifique et ne soigne pas le cancer.

L’auteur de la publication propose une recette pour soigner le cancer dont les ingrédients sont les suivants : “1 feuille bien fraîche d’aloe vera, 3 gingembres frais, un ananas et un corossol“. Il suffit de “porter tout au mixeur et mixer jusqu’à avoir un mélange lisse (sic)” et d’en boire “une tasse les matin et soir pendant 2 à 3 semaines“. Une fois ce traitement suivi à la lettre, le malade doit “aller voir un médecin pour voir les résultats“.

La publication ne précise cependant pas quels types de cancer ce “traitement” est censé soigner (archivé ici). 

Ce pseudo-remède a été partagé plus de 27.000 fois depuis le 20 septembre 2020, des dizaines de commentaires datent de septembre 2024 montrant que, quatre ans après, la publication est toujours virale.

En commentaires, des internautes remercient l’auteur de la publication, d’autres remettent cependant en question l’efficacité du remède avancé.

Le même pseudo-remède a été publié par plusieurs internautes en Afrique de l’Ouest depuis juin 2024.

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Capture d’écran Facebook effectuée le 10 octobre 2024

Le coût de la prise en charge du cancer notamment dans les pays en développement pousse des malades ou leurs familles à se tourner vers des remèdes plus abordables mais dont l’efficacité n’est pas scientifiquement prouvée. C’est ce que Jacques Robert, professeur émérite de cancérologie à l’Université de Bordeaux et praticien hospitalier précise au sujet du remède à base d’aloe vera et de fruits qui circule sur Facebook. “Ce remède n’a aucun fondement scientifique” et “il ne peut ni guérir, ni même soigner le cancer“.

Dans son ouvrage Impostures en cancérologie, Jacques Robert précise que “les dangers de ce type de publication sont de détourner les patients de soins efficaces disponibles dans tous les hôpitaux dans les services de cancérologie“.

Bien sûr que ce remède ne guérit pas le cancer. Ce genre de recettes farfelues se diffusent partout sur internet et il ne repose sur absolument rien” renchérit Dr Manuel Rodrigues, oncologue médical-chercheur et Président de la Société Française du Cancer. Il explique que “le danger principal de telles affirmations est le risque que le patient ne suive plus le traitement du cancer prescrit par l’oncologue. Outre le fait de répéter sans arrêt qu’il n’y a pas de recette miracle et secrète contre le cancer je pense qu’il faut que les patients puissent en parler à leurs oncologues sans avoir peur“.

La peur et le coût des traitements contre le cancer sont les principaux arguments avancés pour attirer les internautes vers des recettes-miracles. Le professeur Pierre Bey, oncologue-radiothérapeute soutient que “ceux qui diffusent ces faux espoirs pour des raisons mercantiles s’adressent souvent à des personnes désespérées et prêtes à tout tenter. Le plus important est d’éviter que des malades avec un cancer accessible à une guérison avec des traitements scientifiquement validés n’y renoncent au profit de ces pseudo-traitements curatifs“.

Le professeur émérite à l’Université de Lorraine explique que le principal argument des promoteurs de ce type de traitements naturels est que beaucoup de médicaments anti-cancéreux sont extraits de plantes, “ce qui est vrai“. Cependant, ces médicaments sont utilisés “après des essais scientifiques d’efficacité rigoureusement contrôlés et avec des préparations correctement dosées les transformant en médicaments efficaces, ce qui prend des années de recherche et de mise au point“, précise le Pr Pierre Bey.

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Une machine pour la radiothérapie dans un hôpital de Kampala, en Ouganda, le 19 janvier 20218. (AFP / SUMY SADURNI)

Tous les spécialistes interrogés par l’AFP indiquent que les pseudo-remèdes et autres traitements dit naturels, qui n’ont pas fait l’objet d’études scientifiques ni de tests rigoureux, sont de nature à détourner les patients des conseils de leurs médecins. Les risques d’abandon des traitements homologués sont aussi une menace pour les patients qui par faute d’information font confiance aux faux-remèdes. La bonne attitude à avoir selon les spécialistes est de chercher à informer le grand public et, surtout, à éviter de contribuer à la diffusion de ces pseudo-remèdes sur le cancer.

Il est important de lutter contre les fakes news et notamment dans le champ de la santé car leurs conséquences peuvent être terribles pour les patients. L’Institut national du cancer est engagé dans cette lutte contre les infox et a développé une rubrique sur son site Les Éclairages qui vise à démêler le vrai du faux en s’appuyant sur des études scientifiques robustes“, explique le Pr Norbert Ifrah, président de l’Institut national du cancer.

Il indique que “les patients, et leur entourage, doivent se montrer vigilants dans certaines situations notamment lorsque les interlocuteurs dénigrent les traitements conventionnels et s’ils recommandent de les arrêter, ou s’il y a une promesse de bienfaits quasi miraculeux. La pratique commerciale avec la vente de produits, livres… doit aussi alerter“.

Les données récentes publiées par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) font état de 20 millions de nouveaux cas de cancer et 9,7 millions de décès enregistrés en 2022 (archivé ici). “Environ une personne sur cinq développe cette maladie au cours de sa vie ; environ un homme sur neuf et une femme sur 12 en meurent” selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) (archivé ici).

© O Bulamba, ADR with AFP

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